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J’ai testé la vie dans un écolieu

Lundi 9 août, 14h30. Nous arrivons au point de rendez-vous, devant un bar nommé L’Avenir dans la commune du Vigan (Gard). Le nom du bar sonne un brin prophétique face à la semaine qui nous attend. Nous sommes trente-six, dont huit enfants et adolescents, le plus grand groupe de l’été à venir faire un stage chez Etika Mondo. Un écolieu situé au cœur du parc des Cévennes, tenu par Boris et Émilie.

Depuis 2018, le couple, accompagné d’une équipe de volontaires permanents ou ponctuels, s’active pour restaurer ce domaine de six hectares et en faire un modèle de société écologique. Chaque été, ils organisent aussi des stages pour partager leur expérience avec des personnes de tous âges et de tous horizons. 

Une expérience qui attire de plus en plus. Les deux dernières années, Etika Mondo a accueilli plus de 450 stagiaires. Un chiffre qui confirme l’intérêt pour les écolieux, les écovillages et les habitats participatifs écologiques en France. On en compte aujourd’hui près d’un millier, selon la coopérative Oasis.

À lire aussi : Ces communautés qui préparent le monde d’après

Le stage permet aussi de s’initier aux low-tech, par exemple le four ou le chauffe-eau solaires. (Crédit : Christelle Gilabert)

Permaculture, écoconstruction, travail du bois…

Une fois arrivés, l’ensemble de l’équipe profite d’un goûter convivial pour nous présenter le programme. La semaine s’annonce intense. Cinq jours pendant lesquels vont s’enchaîner du matin au soir balades en forêt, ateliers pratiques, cours théoriques et activités collectives.

Chez Etika Mondo, la mission affichée est double : subvenir aux besoins humains tout en améliorant la biodiversité. Et ce n’est pas un discours utopique. Chaque jour, des actions très pratiques sont organisées, en s’appuyant sur les sciences de l’écologie. Les ateliers quotidiens permettent de s’initier à la permaculture, au travail du bois, à l’éco-rénovation, à la construction en pierres sèches…

Et lorsque Boris évoque les valeurs qu’il tire de cette expérience de transition, nous sommes frappés par leur dimension presque militaire : “détermination”, “rigueur”, “efficacit锓 Sans action, il n’y a pas d’intelligence”, martèle-t-il. “En écologie, c’est par le faire que l’on progresse.”

Autant d’activités qui se révèlent méditatives voire libératrices. Nous découvrons le bonheur de buriner un mur ou de tamiser de la terre. De travailler avec ses mains et de pratiquer des activités essentielles. 

Lors de nos balades en forêts, on apprend ainsi à observer méticuleusement le paysage pour en comprendre toutes les subtilités : quelles sont les espèces présentes ? Lesquelles sont comestibles ? Comment l’humain influe sur les écosystèmes ? 

L’écolieu s’alimente grâce à un potager en permaculture. (Crédit : Christelle Gilabert)

L’écolieu, ou l’apprentissage de la sobriété

En dehors des ateliers, le stage dans cet écolieu nous fait découvrir les joies de la sobriété pour limiter la consommation d’eau et d’énergie. En cette période estivale, la douche au seau se révèle plutôt agréable. On réalise surtout le peu d’eau nécessaire par rapport à une douche classique. Nous nous lavons au savon de Marseille pour éviter l’introduction de produits chimiques. Les midis, nous mangeons cru, sans renoncer à des repas généreux et gourmands.

La difficulté est surtout d’accepter qu’une vie écologique demande du temps, de l’énergie et de l’organisation. Chaque jour les participants sont répartis en groupes pour s’atteler à l’entretien de l’écolieu et à la vie en collectivité : préparation des repas, nettoyage ou fabrication du pain. Mais on ne parle ici ni de “corvées” ni de “tâches ménagères”. Mais plutôt de “soins”, car “tous ces gestes contribuent au bien-être commun”.

Fabrication d’un enduit écologique à base de sable, de paille et d’argile pour recouvrir les murs. (Crédit : Christelle Gilabert)

Résultat : si certains d’entre nous redoutaient la vie en communauté avant le stage, l’expérience se révèle une bonne surprise. La bienveillance, l’entraide et l’enthousiasme ont régné toute la semaine. 

Tous les participants semblent reconnaissants des moments passés et de ce qu’ils en ont retiré. Sans forcément adhérer à 100 % aux idées ou aux pratiques proposées. Sans forcément être prêt à s’installer définitivement dans un écolieu, chacun repart motivé et ressourcé pour poursuivre sa propre route écologique. 

Au menu du midi : pain et fromage artisanaux, légumes et fruits du potager.

À lire aussi : À Ithaca, une communauté autonome revisite le rêve américain

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