“Le code du travail n’a pas été pensé pour les freelance : ils se retrouvent dans des zones grises”

Face à l’essor du travail indépendant en France, l’un des pionniers du coworking à Paris organise la première Freelance Fair le 16 mars à la Bellevilloise. L’évènement “par, pour et autour” des travailleurs freelance devrait réunir, selon Mutinerie, 500 personnes. 

Trois parcours de découverte seront proposés : un pour les personnes déjà freelance, un pour ceux qui aspirent à le devenir et un pour les start-up, PME, groupes et associations qui souhaitent faire appel à leurs services.

L’occasion pour les travailleurs indépendants de se rencontrer, de réfléchir aux grandes transformations du monde du travail, “de découvrir des outils” et“de nouveaux styles de vie”. Rencontre avec l’organisateur de cet évènement.

We demain : pourquoi avez-vous décidé d’organiser cette première Freelance Fair?
 
Antoine van den Broek : Lorsque Mutinerie a ouvert son premier espace à Paris en 2010, le coworking était encore embryonnaire en France et les freelance, des individus éparpillés sans réelle conscience collective, ni véritable reconnaissance.

En cinq ans, comme le paysage a changé ! Les espaces de coworking se sont multipliés, le mouvement est devenu un marché et, parallèlement, les freelance ont commencé à prendre conscience de leur condition et à devenir l’objet d’une attention plus large.
 
Où en est-on du nombre de freelance en France ?

Selon la dernière étude de McKinsey, la France compte treize millions de travailleurs indépendants, occasionnels ou réguliers, dont cinq millions de personnes pour qui le travail indépendant constitue leur revenu principal.

L’étude de McKinsey a une compréhension très large de ce qu’est un travailleur indépendant. À titre d’exemple, elle prend en compte les personnes qui louent leur logement sur Airbnb.

La complexité, c’est qu’il n’existe pas un mais des types de freelance
 
La situation de freelance recouvre en effet différentes réalités : autoentrepreneurs, entreprises individuelles, EURL, SASU, Agessa, coopérative d’activité et d’emploi, intermittents du spectacles, pigistes… Certains combinent parfois plusieurs statuts. Ils n’ont d’ailleurs pas tous droit à la même protection sociale. Bref, il est souvent difficile de savoir de quoi et de qui on parle ! Il devenait donc urgent de consacrer aux freelance un événement à la mesure du phénomène.

Que pourra-t-on y trouver ?
 
Des plénières, des débats, des tables rondes qui nous permettront d’évoquer les grandes problématiques des freelance, comme les façons de le devenir, leur mode de vie, voire la possibilité de créer une société post-emploi harmonieuse…

Parallèlement à ces onze plénières, nous organiserons des ateliers en petits groupes sur des sujets pratiques comme la gestion de sa comptabilité, la propriété intellectuelle ou encore la coopération entre freelance et entreprise…

Il y aura également une job fair consacrée à des rencontres professionnelles en face à face. Un espace forum réunira les stands de nos partenaires et des experts. Pour une fois, les indépendants vont pouvoir retrouver tous ces spécialistes en un seul et même endroit ; sans avoir à courir à droite et à gauche, comme c’est généralement le cas.

Liberté, pour les travailleurs indépendants, ne rime-t-il pas avec précarité ?
 
La vie de freelance n’est effectivement pas rose, ces travailleurs indépendants sont plus exposés que les salariés. Ils doivent, en plus, composer avec un cadre juridique souvent flou. Le code du travail n’a pas été pensé pour eux et ils se retrouvent bien souvent dans des zones grises.
 
Quelles solutions seront mises en avant à la Freelance Fair ?

Une table ronde sera consacrée au choix des statuts, elle sera suivie d’un débat sur la protection sociale des indépendants. Au-delà de l’aspect pratique, nous voulons contribuer au dialogue social et profiter de cet évènement pour sensibiliser le grand public à ces nouvelles problématiques. Il s’agit finalement de faire émerger une conscience collective au sein de ce groupe d’individus pratiquant des métiers certes très hétérogènes mais partageant un même mode de vie.

Face à ces risques, les freelance s’organisent déjà. Comment ?
 
Ils sont en train d’inventer ensemble de nouvelles organisations. Elles peuvent prendre différentes formes : certaines rassemblent dix personnes, d’autres des centaines de milliers, comme la Freelancers Union — un grand réseau national défendant les intérêts des freelance — qui réunit aux États-Unis 350 000 personnes. Cela va du collectif de développeurs indépendants au syndicat en passant par les coopératives d’activité et d’emploi – comme SMart Belgique — et les communautés rassemblées autour des espaces de coworking.
 
Et en France ?

Deux plénières de la Freelance Fair seront consacrées à ces questions. Un pour tous, tous pour un, qui abordera la question de la représentativité des indépendants en France et United We Stand, une table ronde dédiée aux initiatives inspirantes du monde entier car il s’agit bien d’un phénomène global.
 

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