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Les Français sont-ils devenus moins généreux ?

Le 20/12/2018 par Pauline Vallée

Le Téléthon, grand-messe caritative organisée tous les ans pour récolter des dons pour les maladies orphelines, n’a engrangé cette année “que” 69,3 millions d’euros de promesses de dons. Une nette baisse par rapport à l’édition 2017, où le compteur avait affiché la belle somme de 89,1 millions d’euros. Les Français rechigneraient-ils à mettre la main au portefeuille ? 

Si le nombre de donateurs recule très nettement depuis plusieurs années, le montant total des dons effectués en France en 2018 est en nette augmentation, rappelle l’étude annuelle sur la générosité en France publiée par le réseau associatif Recherches et Solidarités. Autrement dit, les Français sont moins nombreux à donner, mais ceux qui le font donnent beaucoup plus. L’ensemble des foyers imposables ont versé ainsi plus de 500 euros en moyenne sur l’année 2017.
 

Pourquoi alors le Téléthon s’est-il conclu sur un montant en baisse par rapport aux années précédentes ? Certains accusent le contexte social tendu de fin d’année, avec un ressenti général de baisse du pouvoir d’achat. Les manifestations avaient contraint les organisateurs de l’événement à annuler ou déplacer certaines animations, et le plateau télévisé initialement prévu sur la place de la Concorde a dû être rapatrié dans les studios de France Télévisions.

Jean-Paul Kogan-Recoing, cofondateur de l’AMRAC (comité de régulation de la collecte de fonds en face-à-face), y voit la combinaison de plusieurs facteurs : “La collecte de fonds est influencée par les événements sociaux, c’est indéniable. L’année dernière c’était la mort de Johnny Halliday, cette année ce sont les Gilets Jaunes. Ajoutez à cela un sentiment d’instabilité fiscale qui domine. L’instauration du prélèvement à la source inquiète les donateurs. Ils craignent que leurs dons ne soient pas immédiatement défiscalisés.”  
 

Défiscalisation, késako ? Il s’agit en réalité d’une réduction de l’impôt sur le revenu que peuvent obtenir des particuliers suite au versement de dons ou de cotisations à des organismes. “Les jeunes générations n’ont pas du tout cette culture immédiate de la récupération de leur don. Ils sont plus proches de la générosité que du calcul fiscal”, analyse Jean-Paul Kogan-Recoing.

Le don, insiste-t-il, s’inscrit dans une approche générationnelle. Selon l’étude Recherches et Solidarités, les plus de 60 ans représentent un peu plus de la moitié des donateurs (53,6%), et plus de 58% des montants versés, même s’ils tendent à être rattrapés depuis quelques années par les plus jeunes.

Il appartient également au domaine de l’intime, entrant en résonance avec nos propres conceptions de générosité et de citoyenneté. “Le don dans une société est une forme d’impôt volontaire”, analyse Jean-Paul Kogan-Recoing. “Il y a d’un côté l’impôt obligatoire, où vous financez le prochain porte-avion nucléaire sans forcément l’avoir choisi. En revanche quand vous donnez à Action contre la faim ou aux sapeurs-pompiers, vous décidez volontairement de donner de l’argent à une cause d’intérêt général qui manque de financement de l’État.

Le numérique au service du don

Les associations doivent donc s’adapter aux attentes des citoyens et transformer leurs outils pour s’adapter à l’évolution de nos sensibilités et nos pratiques. La collecte en face-à-face continue d’afficher de bons résultats, les paiements s’automatisent. Une autre étude Recherches et Solidarités de novembre 2017 soulignait également l’importance de l’image que renvoient les associations sur Internet, appelant le secteur associatif à “inclure le digital dans [leur] communication pour créer la confiance et donc générer le don”.

L’AMRAC a également lancé début 2018 l’application smartphone “Où je donne” (disponible uniquement sur Apple Store pour le moment), afin de permettre aux donateurs et aux associations de localiser en temps réel les collectes face-à-face dans la rue. “Transparence assurée”, proclame-t-elle.
 

“Nous devons aussi comprendre qu’une association dépense une partie de son budget dans l’opération de collecte, sans quoi les donateurs ne viennent pas à elle”

La remarque n’a rien d’anecdotique. Si les Français semblent faire globalement plutôt confiance aux associations et aux fondations (54 % d’entre eux déclaraient leur faire confiance en 2017), les donateurs se montrent en revanche très exigeants quant à la gestion financière des dons et les missions effectuées par l’organisme receveur. Les associations doivent ainsi jongler entre impératif de transparence et demande de résultats. Ainsi, depuis 1989, le label “Don en confiance” distingue les organismes qui respectent sa Charte de déontologie sur l’appel au don. 

Il faut communiquer avec les donateurs de manière authentique, sans essayer de les manipuler”, estime Jean-Paul Kogan-Recoing. “Mais nous devons aussi comprendre qu’une association dépense une partie de son budget dans l’opération de collecte, sans quoi les donateurs ne viennent pas à elle.

Imaginons qu’une association nous dise ‘on peut éteindre l’épidémie de sida mais il nous faut 2 milliards d’euros pour l’année prochaine’. Pour récolter ces 2 milliards, elle va dépenser 800 millions en collecte, ce qui va paraître énorme aux donateurs. Maintenant imaginons une autre posture qui est de dire ‘je suis une association qui ne dépense que 5% de mon budget en collecte, sauf que je n’ai pas de budget et que je ne fais rien’. Qu’est-ce que va préférer le donateur ?

Le don n’est d’ailleurs pas toujours synonyme d’argent. Vous pouvez également choisir de donner du matériel, ou simplement de votre temps. Si vous avez quelques minutes à perdre en surfant sur le net, vous pouvez ainsi choisir de visionner gratuitement une publicité sur la plateforme Goodeed, qui reverse ensuite l’argent généré à une cause que vous avez préalablement choisie. 

En cette période de fêtes de fin d’année (et de folie consumériste), la plateforme web et application GEEV de don d’objets entre particuliers propose également aux âmes généreuses d’échanger des biens en ligne et gratuitement. Une solution idéale pour offrir une seconde vie aux choses sans les jeter, tout en faisant plaisir aux autres. Et redonner à Noël un peu de sa magie.

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