Partager la publication "On parie que vous ne triez pas correctement vos vêtements ?!"
Ce mardi 5 novembre a eu lieu le Refashion Day, l’occasion pour les acteurs de la filière textile et chaussures d’explorer ensemble des solutions innovantes et durables. Organisée par Refashion, l’éco-organisme de la Filière Textile d’habillement, Linge de maison et Chaussure, l’objectif était de partager des initiatives, d’échanger avec des experts de différents horizons et de faire le point sur l’évolution du secteur, notamment au niveau de la collecte de vêtements.
Cette journée, riche en enseignements et organisée avec l’aide de WE DEMAIN, a été l’occasion de faire le point sur ce qu’on peut, ou pas, déposer dans un point de collecte. Et, il faut bien l’avouer, notre rédaction a appris beaucoup de choses sur le sujet. Alors on s’est dit que ce serait utile de partager quelques informations en la matière parce qu’on parie que, comme nous, vous ne triez pas correctement vos vêtements.
En France, en 2023, 3,25 milliards de textiles d’habillement, linge de maison et chaussures (TLC) ont été mis sur le marché en 2023. Cela représente un volume évalué à 833 000 tonnes, soit environ 12,25 kg par an et par habitant. Énorme. Et côté collecte ? L’an passé, ce sont 268 161 tonnes de TLC usagés qui ont été récupérés (32 %), soit 3,97 kg par habitant. Le tonnage trié en vue du recyclage représente, quant à lui, 187 510 tonnes, soit 23 % de la mise en marché. Bref, on est loin du compte d’un certain équilibre.
“Aujourd’hui en France, 60 % du textile qui est collecté est réutilisé, ou ré-employé, souligne Hugo Conzelmann, responsable des affaires publiques et juridiques de l’Institut national de l’Économie Circulaire. Environ 30 % est recyclé et le reste est incinéré.” En parallèle, le Directeur Général de La Poste a révélé que les colis provenant de deux géants de l’ultra fast fashion, à savoir Shein et Temu, représentent 22 % du total de paquets qui transitent par leurs plateformes logistiques. Énorme encore. La gabegie de textile se poursuit donc de plus belle. “La première piste de progrès, c’est de s’attaquer au flux amont. C’est-à-dire à cette masse de textiles qui arrive et qui menace à la fois le rendement de la collecte, mais aussi la qualité du gisement”, pointe Hugo Conzelmann.
Au fil des décennies, et à mesure que nos penderies s’agrandissaient, le vêtement a perdu de la valeur à nos yeux, en même temps qu’il est devenu plus abordable… car fabriqué dans des conditions souvent indignes à l’autre bout de la planète. Bilan : selon l’ONG Oxfam, on porte en moyenne un vêtement entre sept et dix fois avant de le jeter. Pire : un vêtement sur dix acheté en ligne est détruit sans jamais avoir été porté ! Le mieux serait bien sûr de réduire fortement notre consommation pour tendre vers un vestiaire restreint à l’essentiel. Mais, au minimum, faisons en sorte que nos vêtements aient une seconde vie au travers de la collecte.
Pour cela, il est utile de connaître les bons gestes et quelques règles de base. Première chose à savoir : “Un vêtement ne se jette pas“, a souligné Inès Bizot, CEO de June Marketing lors du Refashion Day 2024, soulignant que “à la maison, 74 % des Français font un tri dans leurs placards au moins une fois par an.”
Il en existe 47 000 répartis dans toute la France. Refashion propose une carte interactive pour découvrir les points les plus proches de chez soi ou de son lieu de travail par exemple. Des enseignes aussi collectent les vêtements. Certaines uniquement de leurs marques, d’autres acceptent tout. C’est par exemple le cas des magasins pour enfants Okaïdi. L’enseigne est agnostique en la matière et c’est tout à fait louable.
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Deux imaginaires existent en la manière : l’image de l’association caritative qui va trouver une seconde vie aux vêtements auprès de personnes dans le besoin ou l’envoie en masse de conteneurs vers l’Afrique, où les vêtements polluent les bords de mer et dégorgent des marchés. Les deux sont vrais mais pas forcément dans les proportions qu’on imagine. Tout d’abord, oui, il est vrai que certains pays importent en masse des vêtements usagés collectés dans l’hémisphère nord. Mais il s’agit d’un vrai business pour eux. “Cela représente 7 % du PIB du Ghana”, a indiqué à WE DEMAIN Marlvin Owusu, directeur exécutif de la Ghana Used Clothing Dealers Association.
Julia Faure, cofondatrice de la marque textile Loom et co-présidente du Mouvement Impact France, confirme : “Ce serait une très mauvaise idée d’arrêter d’exporter des vêtements usagés vers des pays d’Afrique ou ailleurs car tout une partie de la population en dépend. Je doute que Haïti puisse se passer de l’économie de nos vêtements de seconde main. Même si c’est une économie qui vit sous le seuil de pauvreté, hélas. Si on arrête du jour au lendemain d’envoyer nos vêtements, c’est une catastrophe.”
Une partie part donc à l’étranger. Mais plus de 50 % des vêtements, ceux en bon état, sont revendus dans des boutiques solidaires de seconde main, en France ou dans le monde. La part non réutilisable (draps déchirés, sous-vêtements et chaussettes troués…), qui représente un tiers du total, servira à fabriquer de nouvelles matières premières. Ce sont des nouveaux fils pour les vêtements, des isolants pour la construction de maisons et appartements, du rembourrage pour les sièges auto, etc.
Enfin, la partie non réutilisable et non recyclable, environ 10 % des éléments collectés, deviendra du Combustible Solide de Récupération (CSR) utilisé pour créer de l’énergie. Refashion souligne que, in fine, seulement 0,5 % des textiles et chaussures collectés seront éliminés sans aucune valorisation.
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