Paul Duan, ce petit génie des data qui vous veut du bien

P { margin-bottom: 0.21cm; À quoi vous pensez-vous lorsque l’on vous parle de “données” ou “d’algorithmes” ? Aux dérives de la finance ? À la revente d’informations personnelles à des fins publicitaires (Facebook, Google…). À la surveillance massive des internautes par la NSA américaine, et maintenant par les services de renseignement français ?

Paul Duan, lui, y voit une révolution technologique capable de rendre le monde meilleur. À 22 ans, ce Français installé dans la Silicon Valley, en Californie, est à la tête de Bayes Impact, une ONG qui ambitionne de devenir “l’ONU de la data science”. Son message ? “Dix personnes peuvent aujourd’hui changer la vie de 10 millions de personnes avec des algorithmes.”

Un Uber des ambulances

P { margin-bottom: 0.21cm; Ces dix personnes, ce sont des “data scientists”, que Paul a convaincu de se joindre à l’aventure. Fondée en 2014, son ONG a rejoint Y Combinator, le plus prestigieux des incubateurs de start-up outre-Atlantique.

La matière grise de ces spécialistes de l’analyse de données n’a pas tardé à se mettre en mouvement. “L’un de nos projets phares concerne la réduction des risques de réadmission des patients dans les hôpitaux”, raconte Paul Duan, depuis les locaux parisiens d’Officience, une entreprise numérique franco-vietnamienne. Souvent entreprises en urgence et donc très onéreuses, ces réadmissions sont pourtant souvent prévisibles. Pour peu que l’on se penche sur le dossier de santé des patients… Cela, la science des données le peut.

“Nous avons donc mis au point un algorithme que nous expérimentons dans 19 hôpitaux pour soulager les médecins débordés et prédire les rechutes des patients.”

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Dans la santé à nouveau, Bayes Impact s’est fait connaître avec un programme d’optimisation des trajets des ambulances, à la manière d’un Uber. Le programme mis en place par l’ONG permet aux chauffeurs de savoir ou se situe l’intervention la plus proche une fois qu’ils ont déposé un patient à l’hôpital.

Bayes Impact travaille aussi avec les banques, mais pas n’importe lesquelles. L’ONG a planché sur des algorithmes permettant aux organismes de micro-crédit de détecter les fraudes et de prévenir les risques de défaut de paiement. Résultat : celles-ci ont ont vu leur pertes baisser de 30 % et ont pu accorder des crédits moins chers aux populations défavorisées.

Positions établies

P { margin-bottom: 0.21cm; } Décrochage scolaire aux États-Unis, santé maternelle au Bengladesh… Paul Duan grouille d’autres idées pour mettre les données numériques au service du bien commun. Même si cela n’est pas toujours simple. “On bouscule des positions établies, donc on rencontre des résistances”, déplore le jeune homme. Par exemple :

“Certaines compagnies d’ambulances ont tout intérêt à multiplier les trajets, donc les factures, et n’apprécient pas que l’on optimise les déplacements de leurs véhicules.”

Autre obstacle rencontré par l’ONG : les questions éthiques. En France, la Commission Nationale Informatique et Libertés (CNIL) interdit de confier une décision relative à un être humain à un calcul informatique. Car même dans l’objectif de sauver des vies, un algorithme peut choisir de sacrifier certains patients d’un hôpital pour se concentrer sur d’autres.

Et dans les mains de la police, ce dernier priorisera les contrôles contre les jeunes ou les immigrés, se rendant coupable de délit de faciès. “Ces questions vont se poser inévitablement à mesure que nous entrons dans un monde de plus en plus numérique et quantifié, reconnaît Paul Duan. Mais justement : ne vaut-il pas mieux qu’une structure à but non lucratif telle que Bayes Impact s’y penche, plutôt que de laisser les algorithmes dans les seules mains du business ?”

De Trappes à la Silicon Valley

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Ces questions, Paul Duan, a eu l’occasion de se les poser au fil de son parcours. Né dans la banlieue populaire de Trappes, de parents immigrés chinois, il enchaîne avec brio Sciences Po Paris, licence de mathématiques à la Sorbonne, bachelor d’économie à l’université Berkeley… Avant d’accepter un poste de datascientist chez EventBrite, dans la Silicon Valley. “J’étais chargé de réduire les fraudes et j’ai obtenu rapidement de bons résultats”. Mais le petit prodige n’est pas à l’aise dans ce travail.
 

“Je me disais : si je peux utiliser les algorithmes pour faire gagner autant d’argent à une entreprise, je dois aussi pouvoir améliorer la vie des gens !”

De passage en France, Paul Duan a-t-il des idées en tête pour son pays natal ? Il y aurait des choses à imaginer pour lutter contre le chômage, assure l’expatrié. “On pourrait compléter les offres de Pôle Emploi avec celles disponibles sur le net. Et améliorer beaucoup le fonctionnement des administrations en automatisant certaines tâches.”

Numériser et optimiser le fonctionnement de l’État : ce chantier est déjà engagé par Henri Verdier, administrateur général des données, sous l’autorité du Premier ministre. Paul Duan et le Monsieur Data du gouvernement ne pourraient-ils pas faire équipe pour faire passer l’État à l’heure numérique ? Les deux hommes se sont déjà rencontrés, nous glisse Paul Duan. Mais nous n’en saurons pas plus. Et si la l’inversion de la courbe du chômage passait aussi par les data ?

Côme Bastin
Journaliste à We Demain
@Come_Bastin

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