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Sur Tik Tok, les docteurs contrent les fake news médicales

Adeptes de Tik Tok, vous êtes peut-être déjà tombés, entre deux vidéos challenge ou danse du ventre, sur une blouse blanche vous exhortant à freiner votre consommation de sucres complexes ou expliquant pourquoi le jus de céleri n’est pas un remède miracle contre le cancer.

Depuis quelques mois outre-Atlantique, et désormais en Europe, les médecins sont de plus en plus nombreux à investir la plateforme. Format court, musique, chorégraphie… si leurs vidéos adoptent les formats Tik Tok habituels,  elles s’attaquent à des sujets sérieux comme la sexualité, les maladies ou l’hygiène de vie.

La généraliste Rose Marie Leslie rassemble ainsi plus de 500 000 abonnés grâce à ses clips sur la contraception, l’acné ou les dangers de la cigarette électronique. Ils sont aussi des milliers à suivre l’Américain Austin Chiang ou encore Danielle Jones, alias @mamadoctorjones, gynécologue au Baylor Scott & White Medical Center au Texas. Sa vidéo la plus regardée, “Condom broke, now what ?”, où elle explique la marche à suivre pour prendre la pilule du lendemain, cumule plus de 12 millions de vues.

Avec une bonne dose d’humour, et en détournant intelligemment les codes de l’application, ces docteurs 2.0 entendent lutter contre la désinformation : le réseau social fédère en effet un public extrêmement jeune et donc vulnérable aux fake news (40 % de ses utilisateurs ont entre 16 et 24 ans). Et pour cela, quoi de mieux que de passer par les plateformes utilisés par les jeunes au quotidien : YouTube, Snapchat, Instagram… et maintenant Tik Tok.

À lire aussi : L’ultra-court, format roi des réseaux sociaux

Habitué à poster du contenu sur Instagram, le médecin français Ilyass Zouhry (@docteur_iza) a constaté la force de frappe du nouveau réseau social dès la publication de son premier contenu :
 “J’avais décidé de publier une vidéo questions/réponses sur le coronavirus. L’extrait de la vidéo publié sur Tik Tok a généré 40 fois plus de vues que sur Instagram.”

Les gens passent beaucoup de temps sur ces nouveaux outils de communication, c’est une bonne idée de retourner la tendance et de les utiliser pour faire de la pédagogie”, poursuit le pathologiste, qui exerce à l’hôpital Bichat à Paris.

Sur Internet, les théories alternatives bénéficient souvent de la même visibilité que ce qui est valable scientifiquement. Le but est d’apporter une connaissance fiable pour permettre de faire la part des choses.

Combattre les fake news par l’humour

Ces “toubibs du web” sont bien souvent les premiers à démystifier les idées et défis farfelus qui pullulent sur la plateforme. L’occasion de rappeler aux internautes, que non, tremper ses testicules dans de la sauce soja ne permet pas d’en ressentir le goût, ou que la pastille intégrée dans les tests de grossesse n’a pas les mêmes effets qu’une pilule du lendemain. “Ce n’est pas un plan B…”, avertit Rose Marie Leslie dans une vidéo Tik Tok, expliquant aux internautes que la pastille sert simplement à ne pas humidifier certaines parties du test.

Moins inoffensive, la mode du “Skull-Breaker Challenge”, pratique qui consiste à essayer de faire tomber une personne pendant qu’elle saute en l’air, a alerté des médecins qui ont appelé, avec humour, les internautes à ne pas relever le défi.

Consciente de l’audience grandissante de la plateforme, l’Organisation Mondiale de la Santé vient d’ailleurs de créer son compte Tik Tok. Elle y diffuse notamment des informations pratiques pour lutter contre la contagion du coronavirus.

Rétablir le lien soigné-soignant

Via Tik Tok, les médecins espèrent aussi rétablir la confiance des jeunes générations envers le corps médical.  “Autrefois tout le monde savait où vivait le médecin du village. Vous aviez confiance en votre docteur car vous le connaissiez aussi en tant que personne”, souligne Danielle Jones dans les colonnes du New York Times.

Pour rétablir ce lien, “la vidéo est le format idéal”, appuie encore Ilyass Zouhry. “J’essaye de rester captivant, que soit par le décor, la manière de présenter, la musique… Même en deux minutes, on peut transmettre un vrai message.

Mais cette visibilité peut aussi exposer les médecins à du cyberharcèlement, comme a pu l’expérimenter la pédiatre américaine Nicole Baldwin en janvier dernier. La jeune femme publie une vidéo dans laquelle elle met en avant les bénéfices des vaccins et réfute la théorie selon laquelle ils pourraient causer de l’autisme. En retour, elle reçoit des centaines d’insultes, dont des menaces de mort. Sur Tik Tok comme ailleurs, la lutte contre les fake news n’est jamais une promenade de santé. 

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