Partager la publication "Tizi n’Oucheg, un village marocain rendu autonome par ses habitants"
Tizi n’Oucheg, fin août 2015,
Rachid est un homme heureux. Pour ce natif de Tizi n’Oucheg, village berbère du Haut Atlas, perché à 1600 mètres d’altitude au fond d’une vallée étroite, le pari est en passe d’être gagné. Un pari, ou plutôt un défi qu’il s’était lancé il y a vingt ans, lorsqu’il décida de revenir chez lui avec sa jeune femme.
Comment fonder un foyer et élever des enfants dans un village peu à peu abandonné de ses habitants, sans électricité, ni eau courante, sans école ni source de revenus stables ? Rapidement la réponse s’impose, évidente : l’amélioration des conditions de vie passe par le développement de l’autonomie du village tout en s’appuyant (mais sans en dépendre) sur les bonnes volontés extérieures qui accepteront de l’aider. Il s’installe donc comme guide et parvient à intéresser au développement de son village les touristes à qui il fait découvrir les magnifiques paysages marocains.
Une implication forte des habitants
Avec leur aide technique et parfois financière, relayée par une implication de plus en plus forte des habitants de Tizi n’Oucheg dans les projets communs, le village a complètement changé de physionomie en dix ans. Des activités génératrices de revenus ont été développées notamment au profit des femmes. L’électricité éclaire toutes les maisons et l’eau courante, provenant d’une des sources qui alimente le village en eau potable, est maintenant disponible pour tous.
Récemment, une équipe de scientifiques français est venue étudier le sol et a conçu un système de récupération des eaux usées qui, après un processus naturel de décantation et de filtrage, permet d’arroser les cultures et donc d’étendre les surfaces agricoles. Les premiers bassins ont été creusés par les villageois au printemps dernier.
Les secrets de la réussite
Mais le village ne fait pas que prendre des idées aux autres. Son succès inspire des villages de la vallée ou d’autres plus lointains, qui viennent à Tizi n’Oucheg dans l’espoir de comprendre les secrets de sa réussite. Rachid en parle avec un mélange de fierté et d’humilité :
“À chaque fois, nous prenons le temps de leur montrer ce que nous avons fait et comment nous nous y sommes pris. Cela nous fait plaisir de voir que d’autres s’inspirent de nous mais qui sait si l’un de ces villages ne va pas avoir un jour une bonne idée et que nous serons heureux de pouvoir aller apprendre chez eux ?”
Système de solidarité et d’entraide
L’une des clés du succès est assurément le système de solidarité et d’entraide (Tiwizi en berbère) qui est instauré dans ces villages enclavés où l’autonomie est une obligation. C’est dans le cadre du “Tiwizi” que l’assemblée du village peut mobiliser le temps de travail de chacun pour construire une route carrossable (celle qui relie le village à la route principale a nécessité 3 années de travail). La pénalité financière pour celui qui refuse de participer aux tâches communes est rédhibitoire. Conclusion : les tâches sont réalisées rapidement et avec efficacité car personne ne veut avoir à refaire un travail qui aurait été mal fait.
Tizi veut être la première collectivité rurale marocaine à trier et recycler ses déchets. Les grandes villes marocaines n’y sont pas toutes encore parvenues mais Rachid a une réponse toute prête pour les sceptiques :
“Les villes échouent à mettre en place ce genre de programme car elles sont trop grandes. Ici nous sommes 100 familles et nous nous connaissons tous. Cela nous est plus facile d’expliquer, de convaincre et de faire changer les habitudes que dans des villes de plusieurs millions d’habitants”.
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