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Itinéraire d’une easyjeteuse repentie : deux semaines à Majorque sans avion

Pendant des années, j’ai pu m’offrir de beaux voyages. Grâce aux compagnies low cost, je traquais les billets d’avion pas chers, même s’ils m’imposaient souvent des escales qui faisaient exploser mon empreinte écologique. Et je gardais dans un coin de tête d’autres destinations pour “quand je serai grande” – comprendre quand je n’aurais plus besoin de réunir mes pièces jaunes pour me nourrir sur place. Seulement voilà… 

Rapport du GIEC après rapport du GIEC, 2018 est arrivée, et avec elle une certaine flygskam, comme on dit au pays de Greta Thunberg – c’est-à-dire une “avihonte” provoquée par l’impact désastreux du transport aérien sur le réchauffement planétaire. 

Cet article a initialement été publié dans WE DEMAIN n° 31, paru août 2020, toujours disponible sur notre boutique en ligne

Mode de vie sobre

J’ai aussi eu la bonne idée de tomber amoureuse d’un homme spécialisé dans le changement climatique. Parce que c’est un peu mon “Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie” personnelle, baptisons-le Ademe pour l’occasion. Ensemble, nous avons peu à peu changé nos habitudes d’Occidentaux consuméristes. 

Nous avons commencé par réduire notre consommation de viande, déserté les supermarchés pour des circuits courts, changé notre fournisseur d’énergie, résisté aux injonctions de la fast fashion et réduit considérablement nos retours nocturnes et enivrés en VTC. En plus de soigner notre bonne conscience, cela nous a permis de faire des économies. Je précise : nous sommes très loin d’être parfaits. Comme des personnes au régime, il nous arrive de faire des écarts. Disons qu’on essaie de faire au mieux.

En 2018, nous n’avons plus eu le choix : il a fallu faire le deuil de l’avion. En disant adieu au frisson du décollage et aux plateaux-­repas tièdasses, nous avons découvert les plaisirs de la préparation et de l’itinéraire. Après avoir fantasmé sur les trésors du Pacifique, nous nous sommes surpris à rêver de la carte ferroviaire de l’Europe et à bénir les trains de nuit. Nous avons troqué le stress des check-in et des contrôles de sécurité pour des réveils embrumés et émerveillés au cœur d’une ville, en sortant de sa gare. 

Abandonner l’avion

Certes, il a aussi fallu apprendre à anticiper, et parfois à revoir nos envies à la baisse. Car on ne va pas se mentir : rares sont les trajets en train qui rivalisent avec les prix ultra-concurrentiels de l’aviation – en tout cas dans le monde d’avant l’épidémie de Covid-19. Dans nos vies minutées, nous avons donc pris le temps, doublement : celui de préparer et celui de voyager. Réduire son empreinte carbone ne se résume pas à faire le deuil de l’avion. Il s’agit aussi de maintenir en voyage un mode de vie sobre : préférer les maisons d’hôtes aux complexes hôteliers gourmands en énergie, les déplacements à pieds, à vélo ou en transport en commun à la location d’une voiture, l’alimentation locale et peu carnée aux grandes chaînes alimentaires…

Avec son approche d’ingénieur, Ademe s’est mué en comparateur pour optimiser nos itinéraires. Pour cet article, nous nous sommes fondés sur une seule et même source : la base carbone de l’Ademe (la vraie !). Mais il existe des calculateurs bien plus simples, comme celui d’Easyvoyage pour les vols ; pour les ferrys, ça reste un vrai casse-tête. Enfin, ce sont des estimations à pondérer en fonction du type d’avion, de train ou de ferry.

Pour vous donner une idée – et des envies –, voici notre itinéraires au départ de Paris vers Majorque, avec son bilan carbone comparé à celui d’un aller-retour en avion. 

À lire aussi : J’ai fait Paris-Venise en train, et la planète me dit merci

Deux semaines et plus : Majorque avec escales

Pour nos “grandes” vacances d’été, nous avons voyagé près de trois semaines, dont une à Majorque, en faisant des escales et surtout une boucle pour ne pas revenir sur nos pas. C’est l’avantage des itinéraires tricotés sur mesure. Nous sommes partis hors-saison (début septembre) si bien qu’en anticipant, nos billets de train et de ferry étaient abordables. Après une escale de quelques jours à Toulouse, nous avons pris le train pour Barcelone. Où nous nous sommes livrés à une journée tapas et terrasses avant d’embarquer dans le ferry. Cap sur Alcudia. 

Les voyages en ferry sont loin d’être la solution la plus verte pour se déplacer. Si les compagnies font des efforts en renouvelant leur flotte, cela reste un moyen de transport énergivore. Intéressant sur les courtes distances, le ferry a un faible avantage sur les longues distances par rapport à l’avion. La preuve, notre retour de Majorque jusqu’à Toulon était aussi émetteur qu’un retour en avion ! L’idéal : choisir les bateaux plus récents et les trajets de nuit. Où les bateaux naviguent plus lentement et consomment donc moins d’énergie. Plusieurs types de navires rallient Barcelone à Majorque. Les express (sans cabines) et les “normaux” (plus lents mais dotés de cabines). 

À Alcudia, nous avons récupéré une voiture de location. Certes pas glorieux en termes de CO2, mais après avoir envisagé les déplacements en bus et en vélo électrique (option rapidement écartée, vu la topographie escarpée de l’île !), nous avons opté pour la mobilité. Après une semaine de randonnées dans la sublime Serra de Tramuntana et des baignades dans les calanques du nord de l’île, nous avons pris un retour via Toulon pour rejoindre d’abord la presqu’île de Giens. Parenthèse varoise peuplée de pins. Puis Marseille (par le TER). Et enfin le TGV pour un retour à la case départ, Paris.

Bilan carbone de ce voyage sans avion :

  • En avion (à partir de 163 €) : 680 kg de CO2 par passager
  • En train et bateau (à partir de 165 €) : 300 kg de CO2 par passager

À lire aussi : Comment rejoindre Glasgow en train

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