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Charte de l’énergie : 5 jeunes portent plainte auprès de la cour européenne des droits de l’Homme

Ils s’appellent Damien, Maya, Julia, Alexandros et Marion. Ils viennent d’Allemagne, de Belgique, de France, de Suisse et de Grèce. Ces cinq jeunes ont porté plainte auprès de la cour européenne des droits de l’Homme (CEDH). Victimes du dérèglement climatique, ils dénoncent les méfaits du traité de la Charte de l’énergie (TCE) sur l’environnement et… indirectement sur leur qualité de vie et leur santé.

Cette Charte de l’énergie est un traité international, signé par la France et 52 autres pays dans le monde. L’ensemble de l’Union européenne est co-signatrice, à l’exception de l’Italie, qui s’est désengagée en 2015. Son but est de protéger les intérêts de sociétés privées en cas de modification de politiques énergétiques publiques. Selon le traité, ces entreprises peuvent réclamer des compensations financières si elles estiment qu’une politique pourrait g leur activité.

Charte de l’énergie : au bonheur des compagnies multi-énergies

Ce traité permet à des groupes pétro-gaziers – ou même spécialisés dans les énergies renouvelables – de porter leur cas devant un tribunal d’arbitrage privé. Ils ont la liberté déposer plainte contre un ou plusieurs pays s’ils estiment que leur politique énergétique dégradera leurs bénéfices à venir. Ils peuvent ainsi obtenir des milliards d’euros sans même passer devant une cour de justice classique. Et même si leur activité piétine les objectifs fixés par la COP21.

Dans une interview accordée à WE DEMAIN il y a peu, l’experte scientifique Yamina Saheb, co-autrice du dernier volet du 6e rapport du GIEC, avait pointé du doigt les dérives de ce traité. Ancienne employée au sein du secrétariat général du TCE, elle estime qu’il s’agit traité “écocide dont la France doit se désengager”.

La Charte de l’énergie a été créée à la fin des années 90, peu après la chute de l’URSS. Or, ce vendredi 24 juin, doit être décidé un nouvel accord politique autour du TCE. Un accord qui, s’il était ratifié, prolongerait jusqu’en 2040 le principe de la Charte l’énergie.

Des demandes de dommages et intérêts colossales grâce à la Charte de l’énergie

L’activiste Camille Etienne s’est emparée du sujet sur Instagram pour alerter sur cette situation ubuesque. Elle dénonce par exemple la société britannique pétro-gazière Rockhopper. Celle-ci réclame près de 300 millions d’euros à l’Italie. Pourquoi ? Le pays a refusé de lui octroyer de nouvelles concessions d’exploitation offshore pour protéger son littoral… Une autre société britannique, Ascent, poursuit la Slovénie à hauteur de 100 millions d’euros. La plainte a suivi la décision du pays d’Europe centrale de cesser l’exploitation du gaz de schiste. Une technique qui cause des dégâts environnementaux majeurs.

Autre exemple de cas d’arbitrage privé qui va à l’encontre de l’intérêt commun ? Les groupes allemands RWE et Uniper réclament respectivement 1,4 et 1 milliard d’euros aux Pays-Bas. Son erreur ? Avoir annoncé qu’il allait sortir du charbon à… horizon 2030. Au total, 150 cas d’arbitrage de ce type sont en cours, qui impliquent le traité de la Charte de l’énergie. Peu étonnant que le dernier rapport du GIEC pointe du doigt le TCE comme un frein à l’action climatique des États.

“Si on veut se conformer à l’accord de Paris, il n’y a pas d’autre alternative que de sortir purement et simplement du traité de la Charte de l’énergie”, souligne Camille Etienne. Or, ce 24 juin 2022, la révision du traité de la Charte de l’énergie va annoncer une prolongation de la protection des productions dans les énergies fossiles en France et en Europe jusqu’en 2030 (et même 2040 pour les centrales à gaz).

Une plainte auprès de la CEDH pour faire bouger les lignes

En portant plainte auprès de la cour européenne des droits de l’Homme, les cinq jeunes pourraient obtenir gain de cause. Mais encore faut-il qu’ils arrivent à prouver que ce traité fait des victimes en portant préjudice à l’action climatique des pays. Et qu’il va à l’encontre de la lutte contre le réchauffement global de la planète. S’ils y parviennent, la CEDH pourrait alors obliger les États à sortir de ce traité.

Parallèlement, une pétition circule pour faire remonter l’inquiétude de la société civile quant à la prolongation de ce traité. Un site dédié au sujet du TCE a également été créé, détaillant les tenants et aboutissants des enjeux du traité. S’il est contesté de toutes parts, les choses pourraient bouger à terme.

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