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Château Galoupet : le luxe à l’épreuve de la nature

Pour Mathieu Meyer, la conversion en bio s’est imposée dès le début, en 2020. Quand Moët Hennessy lui a confié la direction technique du château Galoupet acheté l’année précédente, avec pour mission d’en faire sortir un rosé gastronomique. Dans ce domaine de 69 ha de vignes entourées de 77 ha de bois, “il fallait tout d’abord ramener de la vie”. Le domaine était en déshérence avec 20 % de ceps manquants et les 80 % restants en mauvais état. Pour qualifier ce sol schisteux des collines dominant Hyères (Var), coupé d’épisodes en grès, pailleté parfois du clin d’œil lumineux d’un éclat de quartz, Mathieu lâche un chiffre “moins de 1 % de matière organique”.

De quoi terrifier n’importe quel paysan digne de ce nom. En effet, la norme sous nos latitudes se situe entre 5 et 7 %. D’emblée, cet agronome et œnologue a senti que l’ambition d’un grand rosé de garde ne pouvait être tenue qu’en construisant un jeu d’échange entre les bois et la vigne. Le premier acte pour la vigne fut “d’arrêter de tuer” en optant pour l’agrobiologie. Le second, de semer des couverts végétaux (plantes légumineuses et mellifères) entre les rangs de ceps pour produire de la matière organique. Opération associant les compétences d’un physiologiste de la vigne, d’un microbiologiste et d’un spécialiste des semences. Le troisième, de renouveler l’encépagement.

Le domaine Galoupet met tout en oeuvre pour régénérer et préserver ses sols vivants. Crédit : Margot MCHN

Ode au temps long pour sauver les sols

Des porte-greffes adaptés à la sécheresse pour accueillir les cépages de l’AOC côtes-de-provence. Crédit : Margot MCHN

A ce jour, 14 ha ont été arrachés et replantés avec pour objectif de renouveler 60 % du domaine. On y retrouve les cépages classiques de l’appellation – syrah, rolle, mourvèdre, cinsault, sémillon, grenache, tibouren – sur un porte-greffe résistant bien à la sécheresse. Chaque parcelle est vendangée et vinifiée séparément.

L’assemblage du Château Galoupet contient 15 % de tibouren. C’est un cépage mésopotamien devenu provençal au XVIIIe siècle, qui apporte un incomparable fruité au vin. Planter de la vigne vous projette dans le temps long où s’invite le réchauffement climatique. Le Syndicat des côtes-de-provence a sélectionné une dizaine de cépages susceptibles d’y résister. Mathieu en teste trois, grecs et siciliens, calabrese, agiorgitiko, moschofilero.

Créer des biocorridors et… laisser faire la nature

La première action pour les bois fut de dresser un état des lieux. Deux ans d’inventaire à compter et cartographier la flore et la faune sauvages. La seconde décision fut d’établir un plan de gestion pour accélérer la renaturation des collines. Il fallait “Planter des arbres pour faire du sol. Outre des chênes-lièges et des chênes verts, en prévision du changement climatique, on a planté des pistachiers et des caroubiers. On essaie de penser à + 30 ans, en collaboration avec le parc naturel, des forestiers, des scientifiques”.

Ensuite, l’équipe limite les plantes envahissantes, pour favoriser le maximum d’habitats et implante 200 ruches pour la pollinisation. Enfin, par endroits, on laisse faire la nature. Comme dans les fonds de vallées humides où la reconquête s’égaie aujourd’hui d’orchidées. Pour favoriser les échanges biologiques, l’équipe a planté un corridor d’arbres entre les bois et les vignes et des rideaux d’arbres autour des parcelles de vignes.

Laisser faire la nature est parfois la meilleure des solutions. Crédit : Margot MCHN.

“Ce n’était pas suffisant, les espaces étaient encore trop grands pour que les insectes indispensables à la décomposition de la matière organique se les approprient. On a divisé, toujours avec des arbres, les parcelles de 3 ha en quatre. Ce qui veut dire trois rangs de vigne supprimés à chaque ligne d’arbres.”

Une bouteille en plastique recyclé

Pour pallier le manque d’eau, il y a des baissières. Ce sont des technique de mares temporaires chères à la permaculture, qui captent l’eau de ruissellement. La cohérence de la démarche écologique va jusqu’au packaging iconoclaste : verre recyclé vert pour le rosé de garde, plastique recyclé translucide pour le rosé courant du Château Galoupet, le Galoupet Nomade. Une telle échelle d’expérimentation est rare, un vrai luxe.

Cet article a été initialement publié dans le cadre de notre supplément “Sols Vivants” réalisé par WE DEMAIN en partenariat avec Moët Hennesy. Il a été publié dans le numéro WE DEMAIN n°39, disponible sur notre boutique en ligne en version papier ou numérique.

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