Partager la publication "En 2022, aucun bébé manchot n’a survécu dans certaines régions de l’Antarctique à cause du réchauffement climatique"
Quel est aujourd’hui le principal prédateur du manchot empereur ? À en croire les scientifiques, ce n’est ni le phoque, ni le léopard des mers ou encore l’orque. Ce n’est pas non plus le pétrel géant. Selon eux, c’est le réchauffement climatique qui fait désormais le plus de dégâts parmi les colonies de manchots empereurs en Antarctique. Une récente étude, dévoilée fin août dans la revue Communications Earth & Environment (Nature), révèle que le niveau très faible de glace en 2022 a provoqué une hécatombe chez les bébés manchots.
Au printemps 2022, la surface de la banquise en Antarctique a été particulièrement faible et a persisté tout au long de l’année. Début décembre, elle atteignait même son plus bas niveau historique (datant de 2021). Selon l’observation des scientifiques à l’ouest de la péninsule Antarctique, cela a eu des conséquences catastrophiques. Aucun bébé manchot n’a survécu au printemps 2022 dans quatre des cinq colonies observées par les chercheurs.
Pour arriver à cette funeste conclusion, les scientifiques de l’étude se sont appuyés sur l’imagerie satellitaire Sentinel-2 du programme européen Copernicus. Les clichés couvrent la période de 2018 à 2022 aux abords de la mer de Bellingshausen. “Sur les cinq sites de reproduction de la région étudiée, tous sauf un ont connu un échec total de reproduction après la débâcle de la banquise et avant le début de la période d’envol de la saison de reproduction 2022, souligne l’étude. Il s’agit du premier incident enregistré d’échec généralisé de la reproduction des manchots empereurs. Un échec clairement lié à une contraction à grande échelle de l’étendue de la banquise.”
Les cinq colonies scrutées via imagerie satellitaire sur une période de quatre ans sont celles de l’île Rothschild, de Verdi Inlet, de l’île Smyley, de Bryan Coast et de Pfrogner Point. Ces groupements de manchots empereurs sont d’une taille très variable. D’environ 630 couples sur l’île Rothschild à quelque 3 500 couples sur l’île Smyley. Seule la colonie de l’île Rothschild a vu des poussins survivre au printemps 2022.
Les colonies de manchots empereurs dépendent de la glace de la banquise entre avril et janvier pour se reproduire. Or, tout changement dans leur habitat a une incidence sur la capacité au poussin du manchot empereur à développer des plumes imperméables et, in fine, à survivre. Si la reproduction est toujours possible, la mue des jeunes volatiles devient de plus en plus difficile.
Peter Fretwell, scientifique du British Antarctic Survey et leader de l’étude, revient sur la cause de cette hécatombe : “Le manchot empereur ne subit aucune menace extérieure, à l’exception du changement climatique et de la fonte de la banquise. Il n’a jamais été chassé, n’a pratiquement aucun contact avec l’humanité.” Selon lui, la raison de cette hécatombe est purement liée au changement climatique. “Vous ne pouvez pas recréer toute cette glace disparue. Il s’agit d’un problème mondial. Si nous ne faisons rien, nous les conduisons au bord de l’extinction.”
Le niveau de la glace en 2023 en Antarctique est encore bien plus bas qu’il ne l’était en 2022. Cela laisse à penser que les colonies de manchots empereurs vont subir des pertes importantes cette année. La péninsule antarctique compte actuellement 15,12 millions de kilomètres carrés de banquise. C’est environ 2,54 millions de kilomètres carrés en dessous de la moyenne évaluée entre 1981 et 2010.
Représentation interactive du niveau de la banquise en Antarctique entre 2014 et 2023. Faites glisser le curseur de gauche à droite pour voir la différence :
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