Partager la publication "Sur l’Île Amsterdam, ordre est donné d’éradiquer rats, souris et chats"
La population d’oiseaux de cette île française de 58 km2 perdue au milieu de l’océan indien a dramatiquement chuté depuis une centaine d’années. Sur l’île d’Amsterdam, une terre australe battue par les vents et la pluie une bonne partie de l’année, l’albatros à bec jaune se fait de plus en plus rare. Lui et une dizaine d’autres espèces d’oiseaux nicheurs sont en net déclin à cause de la forte prédation sur les œufs et les poussins. Même les adultes font l’objet d’attaques.
Ces animaux sont aussi victimes de maladies importées, comme le choléra aviaire. La faute à des espèces allochtones, des nuisibles introduits volontairement ou non, qui ont décimé une partie de la faune locale. Sont visés principalement : les rats, les souris et les chats. Ils abîment aussi la flore de l’île, mangeant la végétation et leurs graines, dont le Phylica, une plante ligneuse arborescente qui formait une ceinture tout autour de l’île mais se fait de plus en plus rare.
Projet RECI pour restaurer ce sanctuaire de biodiversité
Cette île subantarctique de la zone Taaf (Terres australes et antarctiques françaises), située à 3 000 km de tout continent, va être l’objet d’une expérience grandeur nature unique en son genre. C’est le projet RECI, une opération qui vise à la “restauration des écosystèmes insulaires de l’océan indien”.
“Identifié comme l’un des 35 ‘points chauds’ de la biodiversité mondiale, le capital naturel du bassin sud-ouest de l’océan Indien est menacé. Les écosystèmes insulaires sont de véritables sanctuaires de biodiversité. Les espèces exotiques envahissantes ont été récemment identifiées comme la cause principale de ce déclin. Et constituent une préoccupation majeure pour la préservation de ces milieux isolés”, peut-on lire sur le site officiel des Terres australes et antarctiques françaises.
Éradiquer rats, souris et chats de l’île Amsterdam
Il fallait trouver une solution pour essayer de restaurer l’écosystème insulaire et sauver les quelque 25 000 couples nicheurs d’albatros à bec jaune. Ils représentent les 2/3 de la population mondiale de cette espèce. Le gouvernement français a décidé de faire la chasse aux nuisibles qui font un massacre sur les faunes indigènes de l’île, classée comme réserve naturelle depuis 2006. Le calendrier a été fixé à l’hiver austral 2024.
Deux épandages aériens à trois semaines d’intervalle sont prévus. “La difficulté c’est que si on rate un domaine vital de rongeur, l’opération est ratée, indique Lorien Boujot, technicien pour la gestion des mammifères introduits à Amsterdam, à la direction de l’environnement de Taaf. Le projet Reci prévoit par ailleurs des équipes sur le terrain pour peut-être éradiquer les derniers chats présents, par du piégeage et des tirs.”
Une fois cette opération réalisée, il faudra ensuite patienter 2 ans sans détection d’un de ces nuisibles pour évaluer, ou non, la réussite du projet. Ensuite, la direction de l’environnement de Taaf estime qu’une période de 10 ans sera nécessaire pour voir des populations aviaires disparues revenir dans la zone et celles décimées se restaurer peu à peu. Pour la flore, aussi, le temps sera long afin que l’écosystème se régénère. Mais cette expérimentation grandeur nature sera l’occasion de constater dans quelle mesure il est possible de redonner une certaine virginité à des espaces naturels abîmés indirectement par l’intervention humaine.
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