Partager la publication "50 000 spectateurs, zéro déchet : les secrets du festival le plus green de France"
Samedi 30 et dimanche 31 mai, la quatrième édition de ce festival de musiques électroniques et pop accueillera plus de 50 000 personnes dans le parc de Bagatelle, à la lisière du 16e arrondissement de Paris. Son ambition ? Être le plus écolo d’entre eux. Sa directrice Marie Sabot raconte à We Demain les coulisses de ce laboratoire éco-responsable.
We Demain : Comment est née l’idée de We Love Green ?
Marie Sabot : J’ai grandi à Marcoule, une ville du sud de la France connue pour sa centrale nucléaire. Cette centrale a changé le visage de ma région et a nui à la santé de beaucoup de mes amis. Je me suis donc intéressée très tôt aux énergies renouvelables et à notre impact sur la planète. Plus tard, dans le cadre de mon travail au sein de la maison de production We Love Art, qui organise des festivals électro, ces questions se sont imposées. Nous avions l’habitude d’organiser des événements éphémères mais en avions marre de voir les gens danser dans des déchets de bouteilles plastiques et de verre. C’était surtout le moment de participer à cette mutation que connaît actuellement notre société.
C’est-à-dire ?
Dans le parc de Bagatelle, que nous prête la ville de Paris, il nous faut respecter une charte afin de préserver cet endroit fragile. Cela sous-entend de comprendre ses limites, d’utiliser ses ressources, de calculer le tonnage des véhicules pour protéger ses sols et de concevoir un approvisionnement énergétique propre pour l’événement. Mais surtout de prévoir l’arrivée de 50 000 personnes. Passareco, une société suisse, nous fournit des lattes espacées de deux centimètres les unes des autres qui épousent la forme du sol. Quand on les enlève, celui-ci reprend sa forme initiale. Si l’on posait du plancher classique, on étoufferait le gazon.
Absolument. Nous utilisons des lampes basse consommation, des appareils électriques économes, des LED… Nous avons par exemple des espaces de recharge pour les téléphones portables, alimentés par des vélos, et un mini-dancefloor dont l’éclairage est généré par les pas de ses danseurs.
Le système est-il totalement au point ?
Non. Notre part d’ordures ménagères reste élevée, faute de moyens pour faire appel à des sociétés comme Terracycle, qui propose des programmes nationaux de collecte de déchets pour les matériaux difficiles à recycler. L’an dernier, nous avons évacué 10 mètres cube de déchets en deux jours. Un autre problème est celui des mégots. Cette année, nous distribuons 10 000 cendriers design en papier recyclé.
D’autres critères entrent en ligne de compte pour pratiquer une “gastronomie de camping” : cuisiner sur un site avec peu d’énergie, un accès à l’eau compliqué… Tout en privilégiant les produits de saison, les circuits courts, la réduction des emballages… Puis lutter contre le gaspillage alimentaire en favorisant la récup’. Là encore, il s’agit de sensibiliser les restaurateurs, afin qu’ils réitèrent cette expérience sur d’autres festivals.
Par ailleurs, nous distribuons de l’eau gratuitement sur tout le site. L’idée est de faire de l’eau courante un vrai réflexe pour le public. À cet effet, de nombreux points d’eau et citernes sont installées partout, grâce à un important réseau de tuyaux.
Vous n’invitez pas que des musiciens, mais aussi des personnages publics comme l’économiste Jeremy Rifkin ou l’activiste écologique Paul Watson cette année. Dans quel but ?
Ils viendront faire des conférences sur notre troisième scène, spécialement conçue pour cette année de COP21. Parler de sujets complexes à un festival, c’est audacieux. Mais on compte sur l’énergie des speakers pour que chaque festivalier ait la capacité de devenir acteur. Notre public n’étant pas composé que d’écolos, l’idée est de sensibiliser un maximum de gens.
À combien s’élève le budget de l’événement ?
“Seulement” un million d’euros, dont 30 000 euros pour la technique, contre 10 000 si nous n’étions pas engagés dans les énergies alternatives.
Quel est l’objectif à long terme ?
Nous espérons que d’ici quelques années, ces dispositifs seront devenus standards pour chaque festival. On pourra se dire qu’on aura été les pionniers !
Pour cela, il va encore falloir travailler. À la fin de cette édition, nous nous réunirons avec tous les partenaires pour voir qui nuit au bilan carbone du festival et comment y remédier. Propos recueillis par Lara Charmeil
Journaliste à We Demain
@LaraCharmeil
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