Partager la publication "Capter le CO2 dans l’air : solution au réchauffement ?"
Pour capter le CO2 de l’air, on branche un aspirateur à CO2 sur les sites industriels les plus émetteurs : centrales à charbon, cimenteries, aciéries ou raffineries de pétrole.
On utilise ensuite un solvant pour séparer le dioxyde de carbone des autres gaz. Puis on le compresse pour le liquéfier, et le transporter par camion, bateau ou pipeline.
On l’envoie alors sous terre, dans des réservoirs de pétrole ou de gaz vides, des aquifères salins (des poches d’eau inexploitables parce que salées) ou des veines de charbon. L’objectif est d’extraire le CO2 de l’atmosphère durablement, à une échelle de temps géologique, soit pendant plusieurs milliers d’années.
On appelle couramment ces opérations les CSC (pour captage et séquestration de CO2, ou CCS, Carbon Capture and Storage, en anglais).
Il s’agit de cultiver par exemple de la canne à sucre, qui absorbe le CO2 de l’air pour pousser, puis de la convertir en carburant (éthanol) qui sera brûlé dans une centrale électrique, en captant le carbone émis à la sortie, afin de l’envoyer sous terre comme expliqué précédemment. On appelle cela la bioénergie avec captage et stockage du CO2 (BECSC).
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La Norvège accueille depuis 1996 le premier site CSC, dans la mer du Nord, sur une plateforme d’extraction de gaz baptisée Sleipner. Et on comptait 19 sites en opération en 2020, dont près de la moitié aux États-Unis et au Canada (selon le Global CCS Institute qui regroupe les industriels du secteur). Ces installations ont permis de stocker 23 millions de tonnes de CO2 en 2020. Ce qui correspond à une goutte d’eau : environ 0,065 % des émissions mondiales de CO2 annuelles.
Oui et pas qu’un peu. Selon l’Ademe (dans son avis technique publié en 2020, “Le captage et stockage géologique du CO2 (CSC) en France”), ces technologies nécessitent une consommation d’énergie qui entraîne environ 20 % d’émissions supplémentaires sur le site.
Selon l’Ademe toujours, pour capter, transporter et stocker une tonne de CO2, il faut compter entre 60 € et 150 €. Soit un tarif bien plus élevé que celui payé par les industriels pour chaque tonne qu’ils émettent. Le prix de la tonne de CO2 oscille actuellement autour de 50 €. Il n’est donc pas rentable aujourd’hui pour ces industriels d’investir dans les CSC et c’est un des freins à son développement.
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On manque de recul pour évaluer les risques, mais on sait que des fuites massives de CO2 peuvent entraîner l’asphyxie d’humains et d’écosystèmes. On peut craindre aussi des séismes provoqués par l’injection du CO2 dans les profondeurs.
L’usage du solvant pour extraire le CO2 n’est pas sans effets collatéraux : il produit des déchets dangereux et consomme beaucoup d’eau.
Par ailleurs, le déploiement à grande échelle de la technologie BECSC (le couplage culture de végétaux et captation du CO2) entrerait en conflit avec l’usage des terres pour l’agriculture et contribuerait par endroit à détruire la biodiversité.
Les CSC sont des technologies balbutiantes et la recherche continue pour optimiser les processus, baisser les coûts. Mais selon l’IDDRI (Institut du développement durable et des relations internationales), dans son rapport paru en 2018 “La neutralité carbone, défis d’une ambition planétaire”, “les délais de mise en œuvre de cette solution, de déploiement d’infrastructures de transport, de sites de stockage, la difficulté à transformer des sites existants, ne permettent d’envisager qu’une contribution marginale à l’horizon 2050″.
Selon le journal Le Monde, “le lobby pétrolier et gazier est celui qui s’active le plus en faveur du CCS. Des représentants de sociétés pétrolières telles qu’Exxon et Shell, ainsi que leur groupe de pression, l’Association internationale des producteurs de pétrole et de gaz (IOGP), travaillent depuis des années à promouvoir cette technologie à travers l’Europe“. Et pour cause, les promesses, réelles ou pas, des CSC, leur offrent le double bénéfice de récupérer des subventions (un milliard d’euros leur a été distribué par Bruxelles depuis 2009 pour des projets de CSC) et de ne pas remettre en question leur modèle de production.
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