Baptisée « BioAg Alliance », la collaboration prévoit que les deux firmes mettent en commun leurs équipes de recherche et de développement pour commercialiser « des produits microbiens respectueux de l’environnement ». Plus surprenant encore, on peut lire sur le site de la firme que l’agriculture biologique « peut remplacer les fertilisants chimiques pour atténuer l’impact environnemental de l’agriculture tout en améliorant les récoltes ».
Cette alliance s’inscrit en fait dans une tendance générale chez les fabricants de produits phytosanitaires, qui éprouvent un intérêt croissant pour l’utilisation de produits dits de « biocontrôle ». Ces mélanges sont obtenus le plus souvent grâce à des insectes, des champignons, des bactéries ou des virus qui permettent de lutter contre les nuisibles en les empoisonnant ou en perturbant leur cycles de reproduction. Ils sont moins néfastes pour l’environnement et de plus en plus employés par les agriculteurs.
Légume high tech
Ce n’est pas tout. La firme lance sur une nouvelle gamme de légumes obtenus par simple croisement de même espèce, 100% non OGM. Les scientifiques utilisent le pollen d’une plante pour féconder une autre et conserver les traits (résistance, rendement, saveur) les plus intéressants. Ces croisements sont rendues possibles sur les technologies désormais abordables de séquençage et de marquage génétique : on est quand même loin des techniques de croisement ancestrales.
Parmi ces créations : des oignons doux qui ne font pas pleurer, des laitues croustillantes et bourrées de vitamine C, des brocolis aux antioxydants. Le tout, en principe, sans risque pour la santé. « C’est de l’amélioration variétale assistée par la génomique », estime Yves Dessaux, directeur de recherche au CNRS (Centre national de la recherche scientifique), dans TerraEco.
Nouveaux marchés
Si la firme se tourne vers ces nouveaux marchés, c’est d’abord qu’elle sent le vent tourner. Risques sanitaires, dangers environnementaux, les consommateurs rechignent toujours à avaler des OGM et sont à la recherche de fruits et légumes plus savoureux… Le marché des fertilisants de biocontrôle, quant à lui, pèserait 2,3 milliards de dollars par an, selon la compagnie. Le ministre de l’Agriculture Stéphane Le Foll a ainsi récemment insisté sur la nécessité de créer en France des « géants du biocontrôle face aux géants de la biochimie. »
La stratégie de Monsanto ne change pas pour autant. Ces nouvelles créations maraichères seront brevetés au niveau génétique : personne n’aura le droit de les modifier ni de les planter sans acheter les graines à la firme. Le Haut conseil aux biotechnologies, qui s’oppose au brevetage du vivant en France, interdit en conséquence la commercialisation de ces espèces pour le moment. La firme continuera par ailleurs de commercialiser son maïs transgénique MON810 en Europe.
Norvège : un arche de Noé pour sauver les graines (We Demain n°3)