Le Groenland fond six fois plus vite que dans les années 1980

Sa fonte était connue, mais sa vitesse a de quoi donner des sueurs froides. La calotte glaciaire du Groenland – la banquise de la plus grande île du monde – fond six fois plus vite que dans les années 1980, laissant place à des larges rivières, annonce un compte-rendu de l’Académie américaine des sciences (PNAS) publié lundi 22 avril. Un phénomène, dû au réchauffement climatique, qui inquiète les six glaciologues rédacteurs de cette étude. Parmi eux, le Français Eric Rignot : “Il vaut mieux s’asseoir sur sa chaise avant de regarder les résultats, parce que cela fait un peu peur de voir à quelle vitesse ça change, a-t-il déclaré à l’AFP.

Si le Groenland gagnait en moyenne 47 gigatonnes (Gt) de glace par an dans les années 1970, il en a perdu un volume équivalent dans les années 1980. Et ce n’est que la première phase d’une fonte exponentielle : en 2000, la liquéfaction s’accélère (187 Gt/an), et devient plus importante encore à partir de 2010. Avec 286 Gt de perte par an, la fonte se voit multipliée par six par rapport aux années 1980.

Derrière ces chiffres alarmants, une conséquence grave se profile. Si la calotte fond complètement, elle laissera place à sept mètres d’eau supplémentaires dans les océans du monde. La pêche, mais aussi la sécurité des transports maritimes et aéronautiques risquent, entre autres, d’être chamboulés par la montée des eaux.

De nouvelles méthodes très fiables

Ce constat est le fruit d’un travail de longue haleine. Remonter le temps et mesurer la fonte avec précision a été rendu possible grâce à de nouvelles méthodes : d’une part, des satellites mesurent les variations d’altitude du glacier grâce à un laser. La seconde technique, née en 2002, consiste quant à elle à mesurer les variations de la gravité terrestre au moyen de satellites de la Nasa. Les informations récoltées donnent des indications sur la fonte des glaces puisque ce sont les mouvements de l’eau qui sont à l’origine de ces changements gravitationnels. Pour finir, une troisième méthode dite des “bilans de masse ”, apparue dans les années 2000, calcule annuellement la différence entre ce qui s’accumule sur le Groenland (pluie, neige) et ce qui en sort (rivières de glace). Ces trois approches, qui confirment les études de terrains, sont de plus en plus fiables : la marge d’erreur est aujourd’hui de l’ordre de 5 à 7%.

Pour alerter sur cette fonte des glaces à grande vitesse, les scientifiques sensibilisent à coup de chiffres et cherchent aussi des solutions. L’une d’entre elles, pensée par une équipe de chercheurs de l’Université de Laponie dirigée par le climatologue John Moore, consisterait à construire des murs de 300 mètres dans les profondeurs des eaux glacées. L’objectif : empêcher des courants trop chauds d’’atteindre les glaciers.

En attendant d’en arriver là, une autre solution existe : freiner le réchauffement, tout simplement.

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