Partager la publication "L’État suspend la vente de Grignon, berceau de l’agronomie française"
Les défenseurs de Grignon peuvent souffler. L’État vient de suspendre un projet très contesté de vente de ce domaine qui héberge la plus ancienne école d’agronomie française, AgroParisTech. Mais aussi un château classé du XVIIe siècle, 130 hectares de terres agricoles, plus de 133 hectares de bois…
En août, un compromis de vente du domaine avait été signé avec le promoteur immobilier Altarea Cogedim. Ce dernier projetait de construire sur place des bureaux, des commerces et des logements. Accord annulé, a annoncé lundi la préfecture.
“C’est un soulagement et une victoire collective, le fruit d’une énorme mobilisation“, se félicite Clothilde Caron, élève d’AgroParisTech et administratrice de l’association Grignon 2000. Depuis des années, l’association et de nombreux soutiens s’opposent en effet aux projets de vente du site à des promoteurs immobiliers peu soucieux de ce riche patrimoine naturel et historique. Nous vous contions l’histoire de cette résistance ici.
Elle ajoute : “Le projet du promoteur était le moins disant, il engendrait une artificialisation des terres et un démantèlement du site, ce qui ne va pas dans le sens de l’urgence écologique”.
Grignon 2020 : un centre de formation à l’agriculture durable
L’État a aussi reculé car sa Direction de l’Immobilier a reconnu un oubli dans le processus de vente. La Communauté de communes aurait dû bénéficier d’un droit de priorité pour le rachat des terres.
Or la Communauté de communes Coeur d’Yvelines défend un projet alternatif. Celui que portent également les élèves et écologistes de l’association Grignon 2020.
Leur idée : ils ne remettent pas en cause le déménagement de l’école AgroParisTech sur le plateau de Saclay, prévu en septembre 2022. Mais au lieu de vendre le campus à des promoteurs immobiliers, ils veulent le convertir en un centre international de formation à l’agriculture et à l’alimentation durable. “Un lieu où tous les étudiants agronomes pourraient venir faire des expérimentations, un lieu où organiser des masterclass“, poursuit Clothilde Caron. Un projet intégrant aussi des start-up, un hôtel ou un restaurant écoresponsables pour être viable économiquement.
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“Nous ne baissons pas les bras”
À force de manifestations, depuis cinq ans, ce projet alternatif a rallié de nombreux soutiens. Des politiques comme Delphine Batho, Gérard Larcher, des personnalités comme Cyril Dion, quelque 200 scientifiques dont le climatologue Jean Jouzel ou des associations comme La ligue de protection des oiseaux (LPO).
Le sort de Grignon reste toutefois en suspens. Une nouvelle “procédure de cession” du domaine sera lancée au second semestre 2022, a en effet précisé la préfecture. “Nous avons donc peur que cela ne soit qu’un report pour gagner du temps, or il n’y a pas de temps pour les enjeux environnementaux !”, argue Clothide Caron. D’ici là, l’association va donc continuer à construire son projet alternatif, avec les collectivités territoriales, des scientifiques et des entreprises, pour convaincre l’État de sa viabilité. Bref, conclut l’étudiante agronome, “nous ne baissons pas les bras”.