Partager la publication "Mike Horn : “Je suis un aventurier, il faut que je retourne dans la nature”"
On ne présente plus Mike Horn, l’aventurier de l’extrême. Depuis plus de 30 ans, il explore les régions sauvages les plus extrêmes et les plus reculées. Lui, qui a fait le tour du monde au niveau de l’équateur et traversé l’Antarctique en solitaire, compte 27 tours du monde en bateau, 3 fois le tour de la planète à pied et Ses expéditions lui donnent aussi l’occasion d’observer la nature et son évolutions avec le réchauffement climatique et l’intensification de la pollution au fil des décennies.
Mike Horn est de passage à Paris pour évoquer l’avancée des travaux des jeunes lauréats de son projet Pangaea X. Ils avaient 6 mois pour passer d’une idée à un projet concret pour préserver la planète. L’explorateur en a aussi profité pour échanger avec un de ses partenaires, Icebreaker, marque néo-zélandaise de textile en laine mérinos qui l’accompagne dans toutes ses aventures. L’occasion d’échanger avec lui sur ses projets et ses préoccupations environnementales.
WE DEMAIN : Pouvez-vous nous en dire plus sur votre grand projet Pangaea ?
Mike Horn : Il s’agit d’une expédition environnementale autour du monde qui va durer 3 ans. Elle démarre en décembre prochain et se fera par voies terrestres et maritimes – avec mon voilier Pangaea qu’on termine de restaurer. Je suis un aventurier. Il faut que je parte, que je retourne dans la nature. Je vais aller visiter de nouveaux endroits mais surtout des régions où j’ai déjà été parce que j’y ai encore du “business à régler” comme je dis. Je n’avais pas fait le tour de la question. C’est le cas en Himalaya où je veux retourner très haut, par exemple.
Concrètement, comment va s’articuler cette expédition ?
La première partie de l’expédition commence au nord du Groenland. Il n’a jamais été traversé et, avec le réchauffement climatique, la glace a fondu. Je voudrais aller là-bas pour voir s’il y a plus d’ours maintenant. Avant, ils ne pouvaient pas chasser, maintenant, c’est différent. Cela va peut-être donner une nouvelle chance aux ours polaires… Puis après le Groenland, ce sera la jungle puis la Patagonie, l’Antarctique…
C’est aussi l’occasion pour moi de comparer ce que j’ai vu il y a 30 ans avec la situation actuelle. On parle beaucoup de la façon dont les animaux s’adaptent mais c’est peut-être aussi la dernière occasion pour l’homme de s’adapter… En 2006, lors de ma première expédition au pôle Nord, la glace faisait 2,5 mètres d’épaisseur. En 2019, soit presque 14 ans plus tard, elle ne faisait plus que 8 cm. Notre planète change à une vitesse hallucinante.
Pour une telle expédition, comment gérez-vous votre impact carbone ?
Pour nous, c’est super important d’avoir un impact carbone qui diminue. C’est pour cela que nous avons fait de gros travaux sur mon bateau depuis mon retour d’expédition au pôle Nord. Cela fait 1 an et demi qu’il est en chantier. Nous avons enlevé le vieux moteur polluant pour en mettre un qui respecte les dernières normes de pollution. Les génératrices qui fonctionnaient très bien mais, là encore, ont été remplacées car elles n’étaient plus aux normes. Nous avons installé une pile à combustible à hydrogène.
Nous avons mis à jour toute l’électricité – tous les câblages, toutes les ampoules – pour éviter les déperditions. Le bateau est aussi doté d’un échangeur de chaleur qui va permettre de réchauffer le bateau quand le moteur fonctionnera (pour casser la glace par exemple). Il servira aussi à refroidir le bateau dans les zones tropicales. Il y a eu un gros travail de fait sur le recyclage d’eau et d’énergie. On a un bateau au top. Il sera ma maison, mon moyen de déplacement, mon camp d’expédition, ma base de recherche, etc.
Et pour le reste… Quand je suis sur la glace, par exemple, j’ai 0 impact carbone. Je vis sous la tente. Je ne laisse rien derrière moi. Je n’ai pas de chauffage, je ne charge pas mon téléphone… C’est dommage que tout le monde ne parte pas en expédition 1 mois par an, sans utiliser d’énergie et vivre un peu dans la nature, ce serait chouette.
Dans ce genre d’aventure, comment gérez-vous le grand froid ?
Quand j’étais petit, en Afrique du Sud durant l’apartheid, on ne pouvait pas importer grand-chose. Donc ma grand-mère me tricotait mes vêtements avec de la laine et mon grand-père me fabriquait ma veste en cuir pour l’hiver. Depuis toujours, ça me paraît logique de s’inspirer des animaux pour nous vêtir. Si un mouton en Nouvelle-Zélande peut résister à des jours et des jours de pluie, pourquoi ne pas prendre exemple sur eux ? Pour moi, les vêtements ne sont pas faits pour me protéger des éléments mais pour me permettre de progresser dans mes expéditions en dépensant le moins de calories possibles.
C’est pour cela que j’utilise les vêtement naturels, en laine mérinos, de Icebreaker depuis plus de 20 ans. Leur tissage qui coupe le vent, leur zonage plus ou moins épais selon les parties du corps, la laine qui attrape la chaleur mais reste très respirante, le poids plume, l’absence de mauvaise odeur… tout cela fait que je préfère porter trois couches de vêtements en laine au pôle Nord qu’une veste Gore-Tex. Lors de ma traversée du pôle Nord, j’ai marché 138 jours. 138 jours sans changer de vêtements. Et ça n’a pas été un problème. Je me sens plus à l’aise et cela me permet de mieux gérer ma température corporelle. Car il ne faut surtout pas transpirer quand il fait très froid.
On a parlé de votre prochaine grande expédition mais pratiquez-vous aussi la micro-aventure ?
Oh oui, dès que je peux. Et tout le monde devrait en faire aussi. Pas besoin d’aller loin, on peut partir à l’aventure autour de chez soi. Il y a quelques jours, j’ai décidé de juste descendre l’Ardèche. On peut se dire que c’est un peu une destination touristique mais c’est très agréable en cette fin de saison. Avec ma compagne, nous avons descendu l’Ardèche sur 34 kilomètres, passé la nuit dans une base de camping et j’ai eu énormément de plaisir. L’aventure peut se passer dans notre jardin, juste à côté de chez nous. Et la France est superbe. Tu vas à Chamonix, dans le Sud, en Ardèche… Partout il y a de quoi s’éclater.
Enfin, où en est votre autre projet, lié à l’hydrogène ?
Nous y travaillons depuis deux ans. L’idée est de trouver des solutions de production d’hydrogène et de pile à combustible pour décarboner la mobilité. Avec Inocel, nous travaillons à trouver des solutions pour la mobilité terrestre (compétition automobile, camions, etc.) comme maritime. Nous espérons pouvoir participer au Dakar 2023 avec une pile à combustible qui intègre un système hydrogène. Et l’idée est ensuite de commercialiser cette innovation.
SOUTENEZ WE DEMAIN, SOUTENEZ UNE RÉDACTION INDÉPENDANTE
Inscrivez-vous à notre newsletter hebdomadaire
et abonnez-vous à notre magazine.