Partager la publication "Mobilité : comment faire rimer durabilité et inclusivité"
En France, sur les 25 kilomètres parcourus quotidiennement par les Français, plus de 20 sont parcourus en voiture. Et sur 100 voitures qui roulent en France, plus de 99 sont propulsées par des énergies fossiles. Autre difficulté : à Paris, par exemple, à compter de 2024, pour pouvoir continuer à rouler dans la capitale, il faudra posséder un véhicule “Crit’Air 1”. Cela signifie qu’en deux ans, 68 % du parc actuellement en circulation doit être renouvelé.
Ces difficultés dans l’Hexagone sont encore plus critiques dans d’autres parties du monde. “98 % des personnes qui n’ont pas accès à une mobilité simple vivent en Afrique subsaharienne”, souligne Aurélie Dhavernas, manager chez ENEA Consulting. Ce cabinet de conseil en stratégie international est spécialiste de la transition énergétique et de l’adaptation au changement climatique. Elle est intervenue ce 5 septembre 2022 à l’occasion d’une table ronde dans le cadre du Forum mondial 3 Zéro. La question de la mobilité se pose donc partout sur Terre mais les problématiques sont très différentes.
“La question de la mobilité est clé pour les populations précaires, entrepreneurs ou salariés. Sans mobilité, il n’y a pas d’emploi possible, insiste Laure Coussirat-Coustère, directrice générale adjointe de l’association ADIE (Association pour le droit à l’initiative économique). Mais, avec un budget moyen de 3 900 euros pour s’équiper, le choix d’un vieux véhicule polluant est souvent perçu comme le seul possible. Nous essayons de faire évoluer les choses en finançant 1 500 véhicules électriques par an mais aussi par l’éducation financière.”
En effet, en achetant un véhicule thermique d’occasion, on voit avant tout le prix abordable. Mais, avec une vision holistique, en prenant en compte l’assurance, l’entretien du véhicule, le coût de l’énergie nécessaire… le choix est différent. “En achetant un véhicule plus cher au départ mais plus propre et moins coûteux au quotidien, le prix sera le même sur le long terme. Le vrai souci c’est surtout la disponibilité de ces véhicules plus durables.”
Du côté des sociétés de location de longue durée et de gestion de flottes professionnelles aussi, la question de la mobilité durable et inclusive se pose. Stéphane Rénie, directeur de la responsabilité sociale corporate chez ALD Automotive (Groupe Société Générale) explique que sa mission actuelle est d’“accroître la part de véhicules électriques professionnels tout en travaillant sur les nouveaux usages de mobilité, moins centrés sur le recours à l’automobile.”
“Un véhicule électrique, c’est moins d’émissions de CO2, moins d’émissions de particules fines, moins de nuisances sonores. Certes, on a besoin de métaux rares pour les batteries et se pose la question de leur recyclage. Mais, in fine, on estime l’équivalent d’impact CO2 d’un véhicule électrique 65 % moindre qu’une voiture thermique.” Quid de l’inclusivité ? “Le tarif à l’achat est plus important. Il y a 10 000 euros d’écart au prix catalogue en moyenne. Un écart qui s’efface quand on réfléchit à 360° mais l’écart à l’achat reste présent.”
“Mais nous ne travaillons pas que sur l’évolution d’un parc thermique vers de l’électrique. Nous réfléchissons aussi à des crédits mobilité. C’est un budget dans lequel chaque salarié peut piocher en fonction de ses besoins du moment (voiture, scooter, taxi, vélo, etc.). L’idée de faire entrer dans les moeurs des déplacements multimodaux et qui évoluent d’un jour à l’autre. On peut avoir une voiture de fonction plus petite et lui préférer d’autres types de transports. Comme un vélo électrique, le bus, une trottinette de location, selon les envies, conditions climatiques et usages.”
Autant la multimodalité et les choix de mobilité durable sont relativement aisés à réaliser en zone urbaine. Autant, dès que l’on s’éloigne des centres villes pour aller vers les zones péri-urbaines et à la campagne, les difficultés grandissent. La voiture est bien souvent la seule solution permettant suffisamment de flexibilité. Pour autant, en aménageant les espaces différemment, davantage d’options seraient possibles.
“Le problème est l’extrême individualisation des mobilités. Au contraire, il faut faire système. Il faut trouver des choses qui fonctionnent ensemble et développer les multimodalités en créant de nouveaux compromis”, explique Joris Gaudin, co-fondateur La ville E+, cabinet de conseil stratégique urbain spécialisé dans la ville durable. Il a récemment travaillé sur un projet en marge de la ville d’Evreux, dans l’Eure en Normandie.
“Nous avions en charge l’aménagement d’une voie romaine, donc vieille de plus de 2 000 ans, qui était longue de 10 km en ligne droite. Il a fallu prendre en compte l’empattement roues tracteurs mais nous sommes parvenues à trouver une largeur normalisée pour faire une voie cyclable au milieu. Ce ne fut pas simple : il a fallu négocier avec 51 exploitants de parcelles agricoles. Et puis prendre en compte aussi d’autres usagers, comme des cavaliers, des VTTistes, les coureurs à pied… Mais des solutions ont été trouvées.”
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