Partager la publication "Pour réimplanter les abeilles en ville, ils créent une ruche dont le miel ne sera jamais récolté"
“Au début, on s’était juste dit qu’on voulait concevoir le design de la ruche de demain : cinq ans plus tard, nous avons décidé de la créer”. Ce qui n’était qu’un projet d’étude à l’Institut supérieur de design de Valenciennes pour Pascaline Logeais, Benjamin Puill et Marie Ségolène Clément est en passe de voir le jour. Et, potentiellement, de participer à sauver des essaims entiers d’abeilles du déclin.
Habeetation, c’est le nom de leur future start-up, a pour ambition de réimplanter les apoïdes en zone urbaine et de les aider à essaimer. Contrairement aux ruches classiques, aux formes carrées, celles de la start-up seront rondes comme des œufs, conçues en terre et sans traitement. Les trois anciens étudiants ont également prévu d’intégrer une trappe à la partie supérieure de ces ruches, afin de permettre aux apiculteurs de vérifier le comportement et la santé des abeilles qui les habiteront.
Des ruches installées en milieu urbain
Mais l’aspect innovant de ces ruches réside surtout dans le fait qu’elles ne seront jamais vidées de leur miel. “Actuellement, jusqu’à 50 % des colonies d’abeilles disparaissent chaque hiver – dans nos ruches, elles auront de quoi se nourrir pendant leurs périodes d’hibernation, sans le stress provoqué par les interventions humaines et les traitements“, explique Pascaline Logeais.
Ces ruches ont vocation à être essentiellement installées en milieu urbain, afin de les protéger des pesticides massivement utilisés en campagne, considérés comme “plus nocifs encore que la pollution”, rappelle Pascaline Logeais, qui précise que ces dernières doivent se trouver à plus de trois kilomètres d’un champ, d’une autoroute ou d’une antenne-relais. “Notre objectif ultime est bien sûr de les réinstaller en campagne“, ajoute-t-elle. À condition bien sûr d’une réduction drastique de l’utilisation massive de ces pesticides par les agriculteurs.
Pour l’heure, les trois amis s’attellent à finaliser leurs trois premiers prototypes avant la fin de l’été, afin de commencer à installer des ruches dès le printemps 2017. Pour ce faire, ils se sont “rapprochés d’artisans et d’ateliers locaux de réinsertion, afin de favoriser une fabrication responsable et ouverte sur le lien social”. Quant à leurs futurs clients, il s’agirait principalement de collectivités territoriales, d’entreprises ou d’associations, à qui les ruches seront louées à la saison (de façon reconductible) en échange de 1 500 à 2 000 euros.
Revoir l’impact environnemental positivement
“Nous avons estimé que nous pouvions avoir une cinquantaine de ruches au bout de la troisième année”, précise Pascaline Logeais. Pour peupler les premières d’entre elles, qu’ils pensent installer à Marseille, Lille et Bordeaux, ils disposent dores et déjà d’essaims achetés ou obtenus gracieusement auprès d’apiculteurs.
Étant donné qu’à chaque printemps, un essaim se scinde en deux groupes d’abeilles qui se redéploient ailleurs, où héberger ces dernières ? Les créateurs d’Habeetation ont pensé à tout, afin d’attirer ces abeilles dissidentes dans des ruches similaires : “Nous comptons recréer naturellement leur habitat dans nos ruches en y diffusant des odeurs de miel ou de propolis”, détaille Pascaline Logeais. Le tout, en veillant à ne pas surpeupler un périmètre donné, afin de ne pas déséquilibrer les écosystèmes existants.
Et ce n’est pas tout. Les fondateurs d’Habeetation, pour l’heure encore occupés par leurs métiers respectifs, entendent aussi proposer des séminaires de sensibilisation à l’environnement. Y seront abordés la problématique du déclin des abeilles, mais aussi le tri des déchets, les produits ‘”do it yourself”… “Avec notre start-up, nous espérons inciter un maximum les citoyens à revoir leur impact environnemental positivement”, conclue Pascaline Logeais. Un concept et une vision pour lesquels Habeetation (dont le statut d’entreprise sera déposé d’ici 2017), vient de remporter le prix “coup de pouce” de l’Académie de l’entrepreneuriat social porté par Orange et le groupe Inseec et… l’incubateur La Ruche. Ça ne s’invente pas.