Partager la publication "Protection des forêts : place à la décennie de l’action"
Les scientifiques sont clairs : nous cheminons actuellement vers un réchauffement planétaire de 3°C d’ici 2100. Le premier puits carbone des terres émergées, les forêts sont en danger critique, avec la possible savanisation de l’Amazonie et des forêts tropicales qui pourraient devenir émettrices nettes de CO2. Face à ces projections, un mot d’ordre préside à tous les engagements : réduction. Réduction de notre empreinte carbone. Réduction de la déforestation.
Alors que nous subissons de plein fouet la pandémie du coronavirus, la protection et la restauration des forêts émergent – enfin ! – comme un véritable sujet politique. La conviction globalisée du lien entre santé des écosystèmes, des animaux et des humains gagne de plus en plus de consciences. Il aura fallu une épidémie aussi mortelle pour nous mettre face à nos responsabilités : la destruction de la nature – et notamment des forêts – induit un risque pandémie plus violent et plus fréquent. On mesure aujourd’hui pleinement les conséquences économiques et sociales que cela induit.
Loin d’être une baguette magique, les écosystèmes forestiers représentent une solution naturelle majeure dans la lutte contre le réchauffement planétaire. À l’échelle planétaire, les forêts absorbent et stockent environ 30 % des émissions de carbone actuelles dans leur biomasse, dans les sols et les produits bois qui en découlent. Ces inestimables écrins naturels abritent également 80 % de la biodiversité terrestre, source de nombreux services écosystémiques indispensables à la vie humaine tels que la production d’oxygène ou la régulation du cycle de l’eau. Or ce trésor de biodiversité est menacé par la déforestation, notamment nourrie par l’agriculture industrielle. Ainsi entre 1970 et 2014, les populations d’animaux des forêts mondiales ont diminué de 53 %.
On le sait moins, mais les forêts sont aussi éminemment précieuses pour nos économies. Leur valeur a été estimée à 150 000 milliards de dollars. Ainsi à travers le monde, 45 millions de PME forestières forment un extraordinaire terreau pour le développement d’une économie bas carbone et circulaire. Et quelque 13 millions d’emplois pourraient voir le jour dans le secteur forestier d’ici 2030.
Dans ce contexte, bien qu’en recul par rapport aux années 1990, la déforestation continue de faire rage à hauteur de 10 millions d’hectares déboisés chaque année entre 2015 et 2020, révélant l’échec de certains engagements internationaux. À l’image de l’objectif n°1 du Plan Stratégique de l’ONU sur les forêts 2017-2030 qui visait notamment, d’ici 2020, à mettre un terme à la déforestation, à restaurer les forêts dégradées et à accroître nettement le boisement et le reboisement au niveau mondial.
En 2021, les forêts du globe se trouvent à un moment historique. Celui de l’accélération. Jamais n’a-t-il été plus urgent qu’aujourd’hui d’unir nos efforts pour accélérer la lutte contre la déforestation, notamment importée. Il est tout aussi urgent d’accélérer la restauration à grande échelle des forêts disparues. Cette dernière reste le parent pauvre des financements climat puisque les solutions basées sur la nature ne drainent à ce jour que 1 % des fonds destinés à la lutte contre le réchauffement. Oui, la restauration massive et de qualité des forêts du monde est nécessaire. Le GIEC estime à ce titre que parmi les mesures permettant de limiter le réchauffement à +1,5°C d’ici la fin du siècle, une augmentation de 10 millions de km2 des surfaces sylvestres mondiales est nécessaire d’ici 2050.
En 2021, l’avenir nous exhorte à passer d’années de conventions et décélérations à une véritable décennie d’actions. D’actions favorisant les solutions fondées sur la nature telles que les forêts. Celles émanant collectivement des Etats, des organisations internationales, des fonds d’investissement, des entreprises, des ONG et bien sûr des communautés locales et autochtones, des porteurs de projets et des gestionnaires forestiers qui réalisent un inestimable travail sur le terrain. Intimement complémentaires, ces actions fourniront ensemble une part substantielle de la réponse mondiale à la crise jumelle du climat et de la biodiversité.
Alors que nous entrons dans la Décennie des Nations unies pour la restauration des écosystèmes, nous approchons du Congrès Mondial de la Nature prévu en septembre à Marseille, la COP 15 Biodiversité prévue en novembre à Kunming, la COP 26 Climat prévue en novembre à Glasgow… Il est donc urgent de s’assurer que la protection et la restauration des forêts soient au cœur de l’agenda international. Pour agir, enfin, sans faillir.
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