Respirer

“Si nous ne faisons rien, 90 % des récifs coralliens seront condamnés à l’horizon 2050”

Les récifs coralliens ont traversé des milliers d’années pourtant nombre d’entre eux ne survivra probablement pas au réchauffement climatique. En mai 2022, les scientifiques observaient inquiets le blanchissement de 91 % de la Grande Barrière de corail en Australie. Un corail qui se décolore, jusqu’à devenir tout blanc, reste le signe alarmant qu’il a perdu ses micro-algues indispensables à sa survie et donc qu’il dépérit… Et ce dépérissement s’observe dans le monde entier, menaçant la survie de nombreuses espèces et impactant les conditions de vie de millions de personnes. Car l’océan contribue non seulement à fournir l’air que nous respirons mais aussi à réguler le climat en retenant cinquante fois plus de CO2 que l’atmosphère, selon l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA).

Un océan vivant reste un véritable atout pour lutter contre le réchauffement climatique. À condition bien sûr de se montrer capable de le protéger, le restaurer. C’est l’ambition d’un jeune homme de 23 ans, Titouan Bernicot, en fondant il y a cinq ans, le Coral Gardeners. Une organisation dédiée à réparer l’océan. Son action, démarrée en Polynésie Française où il vit, prend aux quatre coins de la planète. Nous l’avons attrapé de justesse à Paris, à l’occasion de sa venue pour le festival We Love Green. Après vingt-deux heures de voyage, douze heures de jet lag et une arrivée mal enclenchée avec la perte de son portable dans le taxi, cet activiste rarement hors de l’eau, retrouve toute son énergie dès qu’il se met à parler des récifs de coraux.

WE DEMAIN : Comment vous présentez-vous ? Planteur de corail ?

Titouan Bernicot : Mon métier reste assez peu définissable. Je dis juste que je suis fondateur de Coral Gardeners. Une organisation de sauvegarde des récifs coralliens dont l’action regroupe la restauration corallienne (en bouturant et en plantant des coraux), la sensibilisation des populations locales et mondiales à des problématiques liés aux récifs mais aussi la recherche et l’innovation. 

Titouan Bernicot en pleine plongée au milieu des coraux. Photo : Ryan Borne for Coral Gardeners.

À quoi tient la survie des récifs ?

En arrivant tout à l’heure, je me demandais : “Comment parvenir à connecter les Parisiens à ce qui se passe sous la surface ?” La menace sur les récifs coraliens reste un enjeu et une problématique urgente. Ils pourraient être les premiers écosystèmes à disparaître de notre planète Terre. Si nous ne faisons rien, on estime que 90 % des récifs seront condamnés à l’horizon 2050. On perd nos fonds marins à une vitesse grand V. Pourtant, l’air que vous respirez provient des océans grâce à ses écosystèmes et à ses récifs. Nous sommes tous connectés. Alors si vous aimez respirer, il faut s’intéresser à ce qui se passe sous l’eau.

Vous plantez 20 000 coraux par an mais est-ce suffisant pour gagner cette course contre la montre ?

Sauver les récifs reste un défi d’une taille colossale. Parfois je suis découragé. Mais souvent je me dis que l’on plante des arbres sur Terre depuis des millénaires. Alors que cela ne fait que quelques décennies que l’on plante des coraux dans les fonds marins. Je crois aux avancées, aux nouvelles méthodes qui devraient également nous aider à accélérer notre action. Nous travaillons par exemple avec des coraux plus résilients, les “super coraux”. Ils peuvent résister à certains stress comme le blanchiment coralien. Et quand je vois des jeunes de plus en plus nombreux à préférer donner un sens à leur vie plutôt que d’en tirer un maximum de profit, je reste confiant.

Face au réchauffement climatique, les récifs coralliens sont particulièrement en danger. Photo : Ryan Borne for Coral Gardeners.

Voyages en eaux claires” avec Titouan Bernicot et l’explorateur Mike Horn, samedi à WE LOVE GREEN, Bois de Vincennes, Paris. We Love Green

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